Le Père Sylvain Gasser à Sokodé

 

 

Les Frères Vivien, Lucas, Georges, Roland, Jean Claude et Fabrice ont renouvelé leurs vœux à Sokodé (Togo) le 31 septembre passé. C’était au cours d’une célébration eucharistique présidée par le Père Sylvain Gasser, Premier Assistant provincial, venu de France pour recevoir les vœux. Ce renouvellement est suivi, le lendemain, de la profession des vœux temporaires de quatre nouveaux Frères : Bernard, Emile, Fabrice Marie, Michel qui vont nous rejoindre dans quelques jours.  

Nous vous proposons l’homélie du P. Sylvain, du 31 septembre, que nous nous permettons d’intituler ainsi « En renouvelant votre profession religieuse, vous manifestez bien que vous n’êtes pas arrivés au bout du chemin, que tout reste à accomplir »

 

Vivien, Lucas, Georges, Roland, Jean Claude, Fabrice, Frères !

Vous venez d’entendre la première des trois paraboles qui composent le chapitre 25 de Matthieu, que l’on connaît sous le titre de Jugement dernier. L’heure où tout se joue est arrivée. Fini les discours ! Fini les hésitations ! Fini les atermoiements. Et c’est aujourd’hui que vous êtes appelés à renouveler vos vœux religieux.

Vous avez dit OUI ! Redites-le ! Vous avez voulu conformer votre vie aux mœurs de l’Évangile ! Redites-le-nous ! Vous avez voulu élargir votre horizon ! Montrez que vous en êtes capables. Car pour vous aussi, il n’est plus temps d’attendre. Vous êtes les six frères des cinq jeunes filles prévoyantes, prêts à prendre le départ, à être des hommes en route qui ne comptent ni la fatigue de la marche ni les soucis du chemin. Pourquoi une telle urgence ? Pourquoi une telle hâte ? Parce que le Christ s’en est déjà allé, parce que son départ a sonné la retraite de l’Église ; l’Église naît, démarre, l’Église se met en train, elle reçoit sa mission, elle se met au travail ; et vous voudriez rester sagement assis sur le bord de la route ! Aujourd’hui, je voudrais donc vous inviter à approfondir la dimension missionnaire de votre consécration. Notre vie religieuse ne tourne pas nos yeux vers le ciel mais vers la terre.  Nous ne scrutons plus le ciel, nous devenons sentinelles de la terre. Car il y a une Bonne Nouvelle à proclamer qui réclame que nous retroussions nos manches et portions dans un geste de solidarité, l’immense souci du monde.

La mission de l’Église prend donc forme. Cette mission est universelle. À l’heure de l’Internet qui nous fait vivre les événements à l’échelle d’une planète réduite comme une peau de chagrin, nous croyons nous habituer à ce regard mondial. Mais avons-nous idée pour autant de la diversité de cette humanité répandue à travers le monde ? Avons-nous conscience de la diversité qui s’étend en nos lieux de vies ? La bonne volonté du témoin ne suffit pas. Il lui faut une extrême attention à l’autre, à l’autre culture, à l’autre religion. Il y a des autres qui ne nous ressemblent pas, et c’est avec eux qu’il faut aussi faire Eglise. Nous ne savons pas ou si peu ce qu’est une Église togolaise, burkinabé, congolaise, roumaine, malgache, camerounaise ou française : la Pentecôte est encore à venir.

le Père Sylvain (au cours de son homélie du 31 août 2012)

À l’Assomption, la majorité de nos communautés se sont internationalisées. Nous apprenons ainsi, avec patience et difficulté que si les cultures ne dialoguent pas en nous, elles risquent bien de ne jamais dialoguer autour de nous.

Frères, en renouvelant votre profession religieuse, vous manifestez bien que vous n’êtes pas arrivés au bout du chemin, que tout reste à accomplir. Vos lampes emplies d’huile sont une manière de dire combien vous restez sur le qui-vive de l’appel entendu. N’étouffez pas cet appel ! Il est un don de Dieu. Vous construisez votre vie d’homme dans la réponse à cet appel, qu’il vienne de Dieu, qu’il vienne des hommes, car votre vie est tissée de la succession de ces « Me voici », de ces présences à l’appel. Le monde s’ensommeille mais l’Évangile réveille.

Le Oui que vous allez redire vous fait entrer dans le rassemblement des appelés, de ceux qui s’éprouvent convoqués par la Parole de Dieu à devenir corps du Christ en ce monde. A Ouaga, après avoir quitté Sokodé, vous comprenez que votre engagement n’est pas rupture avec le monde, ni fuite du temps, ni désintérêt de l’histoire. Vous choisissez un style de vie qui se démarque des exemples valorisés par la société : la possession, la sexualité, l’indépendance personnelle.

Mais tout cela ne servirait de rien ni vous ne mettiez en avant d’autres formes de fraternité et de solidarité, notamment avec les plus petits qui n’ont pas le choix de la pauvreté.

Vous êtes hors du monde ? Non, vous portez le monde de l’intérieur. L’actualité habite votre prière. Les vœux qui vous lient au Seigneur vous font épouser les joies et les détresses de l’humanité qui vous entourent.

La profession religieuse n’est pas nouvelle version du « Moi et mon Dieu » ; elle inclut un 3e partenaire : le peuple des hommes, ici et plus loin, jusqu’à la création tout entière. Je te vois, frère, dans ta vie de prière. Mais ton peuple, où est-il ? L’as-tu abandonné ? L’as-tu seulement rencontré ? Aimé ? Relevé ?

La Parole de Dieu atteint les corps. Elle n’est pas une réalité éthérée. Elle se matérialise. La Parole vivante de Dieu devient vie et vie parlante pour l’homme. Pour la mission, cela veut dire que le témoignage est inséparable du service. La parole s’accompagne de signes. Frères, montrez-nous vos signes distinctifs de religieux ! Il ne suffit pas de parler, il faut aussi confirmer la Parole par des signes. Et des signes qui ne soient pas seulement internes à notre communauté mais visibles à l’extérieur. Ce n’est pas une mince affaire !

Il y a urgence ! L’époux est déjà passé, il n’attend plus. Le Royaume qui est en jeu, c’est la salle des noces que l’époux va maintenant ouvrir. Ce Royaume dont vous pouvez vous targuer d’en être les fiers artisans réclame tout de vous, tout et tout de suite : elle est là, la radicalité de la vie religieuse !

Vous voulez suivre le Christ ? La belle affaire ! Vous ferez mieux que le suivre, vous l’incarnerez par la sainteté de votre vie, et vous vous identifierez à lui en vous faisant serviteur du plus petit.

Vivien, Lucas, Georges, Roland, Jean Claude, Fabrice, veillez et laissez-vous emplir du Souffle saint. Les vœux d’obéissance, de pauvreté et de chasteté que vous allez prononcer une nouvelle fois sont à leur manière signe que l’Époux est là, prêt à vous accueillir dans la salle de noces, vous destituant de toute prétention grossière.

Vous allez dire oui ? Eh bien, soit ! Vous voici pauvres comme le Père qui a tout donné au Fils et rejeté toute gloire indue. Vous voici chastes, animés par l’Esprit d’une hâte de voir le retour du Seigneur, car désormais, vous ne penserez qu’à ça ! Vous voici obéissants comme le Fils, hommes à l’écoute attentive des bruits du monde, des cris des hommes, du silence des croix ! Amen !  (P. Sylvain Gasser, à Sokodé le 31 août 2012)

 

Lucas, a.a.

 

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