De mes lectures sur le Père Emmanuel d’Alzon, plus particulièrement du Livre « Ma vie c’est le Christ, Emmanuel d’Alzon » d’André Sève, je retiens l’image d’un père spirituel tendre et soucieux de la présence et de l’amour de Dieu dans toutes ses relations. Que ce soit dans ses amitiés de jeunesse, dans son amitié avec sa sœur cadette Augustine ou avec Mère Marie Eugénie, le Père D’Alzon a toujours eu le souci de la présence de Dieu. Pour lui, on ne peut pas dissocier l’amour des hommes de l‘amour de Dieu. Il faut plutôt aimer Dieu en chaque être, car tout homme possède en lui la divinité suprême qui est Dieu. Comme le souligne André Sève, Emmanuel d’Alzon expérimente bien, que plus on est humainement un être d’amour, plus on aime Dieu.
La valeur divine accordée à ses amitiés, il la tire de sa méditation sur l’amitié partant du chapitre 6 de l’Ecclésiaste quand il n’avait que 19 ans. Ces paroles de l’Ecclésiaste, le père D’Alzon va les vivre toute sa vie. Il apprend ainsi, dès son jeune âge, à travers les Saintes Ecritures, à aimer les hommes comme le Christ. Il faisait donc l’effort de trouver en chaque personne le visage de Dieu. André Sève dit du Père d’Alzon qu’il vivait dans un monde foisonnant où ni Dieu, ni personne ne pouvait être délaissé. Possédant un cœur tendre et aimable, il ne pouvait pas ne pas aimer Dieu en l’homme.
Soulignons que le père D’Alzon, avait un lien d’amitié particulier avec sa sœur cadette Augustine. Ses correspondances avec celle-ci témoignent bien de la tendresse et du respect qu’il lui accordait. Il n’était pas seulement gentil envers elle, mais il l’aidait souvent en la secouant. L’amitié ne se résume pas alors en des mots doux et tendres, mais dans la recherche permanente du bien-être et de l’épanouissement de la personne aimée.
Pour Emmanuel D’Alzon, l’objectif de toute amitié est que l’on s’aide mutuellement à atteindre la perfection chrétienne : la sainteté. Il est donc important de se supporter, de ne plus s’attarder sur les petits soucis qui refroidissent les relations mais de cultiver la tendresse chrétienne qui n’est rien d’autre que l’attention accordée à l’autre, la fraternité. Et cela, il l’a bien expérimenté avec Mère Marie Eugénie, avec qui il va entretenir une amitié qui va durer 40 ans. 40 années d’échanges de correspondances amicales faites de tendresse et d’attention au bien-être spirituel et humain de chacun. Une amitié qui les poussait à se faire des reproches souvent vifs et à s’encourager sur une vie de Sainteté, à ne rechercher que Dieu dans leurs relations. « Devenez une Sainte (…) Devenez un Saint (….) » s’écrivaient-ils.
Il est important de souligner que, grâce à une tendresse nourrie d’une simplicité de rapports, de cordialité heureuse et de franchise, le père d’Alzon a su semer un esprit communautaire dans le cœur des frères de sa congrégation. Un esprit qui caractérise aujourd’hui toutes les communautés assomptionnistes à travers le monde. Dans le Directoire, il veut, que la charité fraternelle qui caractérise une communauté assomptionniste soit empreinte de tendresse et d’estime. Il invite ainsi ses religieux à cultiver dans leurs communautés plus de charité fraternelle, de franchise, d’humilité et d’affection. Pour lui, ce sont là les socles d’une communauté solide et fraternelle : « Soyez simples et doux » aimait-il répéter à ses religieux.
L’amitié a besoin de signes visibles et c’était bien le secret du Père D’Alzon. Je reprends volontiers cette phrase du père d’Alzon, citée par André Sève dans son livre « Ma vie c’est le Christ, Emmanuel d’Alzon » : « ce n’est pas tout d’avoir de bonnes choses au cœur pour nos amis, il faut savoir le faire connaitre ». Ce comportement chaleureux, précise André Sève, a engendré quelque chose qui marque fortement les assomptionnistes : « l’esprit de famille ».
Aujourd’hui, le père d’Alzon nous invite à aimer Dieu avec franchise dans nos relations avec nos frères. Car, comme il l’écrivait à Marie Eugénie, « entre l’amour suréminent de Dieu et l’amour général de nos frères, la grâce prépare dans le silence d’autres rapports ». C’est aussi une invitation à aller aux limites de notre cœur dans nos relations d’amitiés. Il est important de rechercher les causes de nos différends et de nos disputes dans notre propre cœur. Car parfois nous sommes nous-même responsables de ces malentendus. Comme le souligne André Sève, « il est agréable de se poser en innocente victime, on veut avoir raison, mais la charité sincère sait aller par-delà ces menteries (…) ; elle reconnait franchement que nous n’avons eu que ce que nous méritons ».
Que grandisse chez tous les frères et surtout chez les jeunes générations, cet esprit de famille dont nous sommes les premiers héritiers. Portons le royaume de Dieu avec tendresse et communiquons-le au monde, pour que naisse aussi, chez nos frères et sœurs, ce désir ardent d’aimer Dieu en nos semblables.
Jean-Valère KOUWAMA,
Novice a.a.